Le froid, un facteur de risque pour les TMS
Travailler dans un environnement froid présente des dangers pour la santé. L’exposition directe au froid peut entraîner des pathologies graves, telles que l’hypothermie et les engelures. De plus, le froid accroît le risque de troubles musculosquelettiques et peut provoquer des accidents du travail.
Dans un environnement neutre, le corps maintient une température stable de 37 °C (+ 98,6 °F). Lorsque notre corps est exposé au froid pendant une longue période, certaines parties peuvent s’adapter mais d’autres peuvent se fragiliser, voire se détériorer.
Nous allons voir ensemble en quoi le froid agit sur notre corps et comment il augmente le risque de TMS.
Les effets du froid sur le corps
Lorsqu’il est exposé au froid, l’organisme active des mécanismes pour conserver la chaleur, comme la vasoconstriction cutanée. Les frissons peuvent augmenter la production de chaleur corporelle jusqu’à 500 %. De plus, le corps compense les pertes thermiques en générant sa propre chaleur, notamment par la transformation de l’énergie fournie par les aliments et l’effet de l’activité physique.
À l’inverse de la chaleur, où notre corps peut s’acclimater, le froid peut simplement engendrer une tolérance sur certaines parties du corps – mais on ne parle pas d’acclimatation totale.
L’hypothalamus, une glande située au centre du cerveau, agit comme le thermostat de notre corps. Des thermorécepteurs, présents sur la peau, principalement au niveau du visage, des oreilles, des mains et des pieds, ainsi que le long de la moelle épinière, détectent la température interne du corps et celle perçue à l’extérieur. Ces informations sont ensuite transmises à l’hypothalamus.
Le fait que notre corps réussit à conserver notre température est appelé homéothermie et elle permet un fonctionnement métabolique optimal. Voici quelques facteurs physiologiques qui sont importants pour la production de chaleur de notre corps :
- L’apport alimentaire ;
- La réserve d’énergie (glycogène*) ;
- L’activité physique ;
- Les frissons – une réaction réflexe qui accroît la production de chaleur dans le corps lorsque nécessaire. Cependant, cette réaction ne peut se maintenir que quelques heures en raison de l’épuisement des réserves de glycogène musculaire et de la fatigue qui en résulte.
De plus, nous ne sommes pas tous affectés de la même manière par le froid.. Selon certains critères, nous avons une résistance différente : certaines pathologies, différents métabolismes, l’âge (enfants et personnes âgées) ou encore une cause hormonale.
Le froid et les TMS
Selon les recommandations de l’INRS, un environnement de travail est considéré comme froid lorsque la température de l’air est inférieure à 18 °C.
Certaines professions exigent de travailler dans des environnements froids :
- L’industrie agroalimentaire (abattoirs, conditionnement de produits surgelés, chambre froide, etc.)
- Les travaux extérieurs en hiver (BTP, agriculture)
- Le secteur du transport et logistique ;
- Le travail en entrepôt frigorifique.
Le froid peut être responsable d’un certain nombre d’impacts sur le corps comme une fatigue accrue, perte de dextérité, des engourdissements ou encore des crampes. Cela peut également être une cause – directe ou indirecte – d’accidents du travail. En effet, le froid peut provoquer des assoupissements ou encore des douleurs d’intensité variables ce qui peut causer des accidents comme des chutes ou des pertes de vigilance entraînant une augmentation du risque d’accidents.
Le travail au froid peut provoquer une diminution des performances mentales (augmentation du temps de réaction, du temps de décision, etc…). Ou encore une diminution du ressenti et la dextérité (dès 15°C) générant une augmentation de la force appliquée à un effort et donc augmentant le risque d’apparition de TMS.
Comme évoqué précédemment, le corps est particulièrement affecté par le froid – on rappelle qu’en dessous de 35°C, le corps est en hypothermie. Le travail au froid augmente donc les risques de troubles musculo-squelettiques causés par un manque de repos suffisant, des postures extrêmes, des mouvements répétitifs – ajouté à cela des températures basses, le corps est d’autant plus exposé.
Les facteurs environnementaux sont des facteurs de risque indirects aggravants. Lorsqu’une personne y est soumise, elle est davantage exposée au risque de TMS.
Dans les facteurs environnementaux, nous pouvons citer le volume sonore, des vibrations, des poussières ou encore de l’éclairage mais surtout l’exposition au froid. Elle perturbe l’activité manuelle et provoque l’imprécision des gestes, des gelures, des crampes, de l’hypothermie, une diminution de l’irrigation sanguine des doigts avec le syndrome de Raynaud, etc.
Ce syndrome est un trouble de la circulation sanguine qui touche principalement les doigts, et potentiellement les orteils : l’exposition au froid provoque une pâleur, une sensation de froid et une perte de sensibilité pouvant durer de quelques minutes à plusieurs heures. Les travailleurs de certains secteurs professionnels sont plus susceptibles de développer une maladie de Raynaud.
Les facteurs aggravants au froid
Souvent occasionnée par le froid et l’environnement de travail, l’humidité est un facteur aggravant. En plus d’accroître la sensibilité du corps humain au froid, l’humidité peut rendre les sols glissants, augmentant ainsi le risque de chutes et d’accidents du travail.
Le froid étant un facteur sensibilisant du corps, les chocs ou les vibrations aggravent la situation. En effet, le corps est beaucoup plus sensible car les structures musculosquelettiques sont fragilisées dû au froid.
Les solutions pour améliorer
Le Code du Travail ne donne pas d’indication sur les températures minimales de travail et ne prévoit pas de dispositions particulières relatives aux températures de travail. Cependant l’employeur est tenu de former, informer et instaurer des mesures de prévention afin de réduire les risques pour la santé liés aux conditions de travail en milieu froid.
Au niveau réglementation, d’après l’article R4213-7 du code du travail, il est précisé que : les équipements et caractéristiques des locaux de travail sont conçus de manière à permettre l’adaptation de la température à l’organisme humain pendant le temps de travail, compte tenu des méthodes de travail et des contraintes physiques supportées par les travailleurs.
De plus, selon l’arrêté du 8 janvier 1962 ;”Au cours des périodes durant lesquelles des travailleurs affectés d’une façon habituelle à des postes de travail en plein air sont soumis à des sujétions particulières résultant de l’exposition à des intempéries, les employeurs devront mettre à leur disposition au moins une boisson chaude non alcoolisée”.
Nous pouvons citer quelques autres moyens de prévention tels que :
- Limitation du temps d’exposition au froid afin de favoriser la polyvalence des opérateurs et augmenter les rotations de postes ;
- Travail en équipe : au minimum 2 personnes dans des chambres frigorifiques afin d’accroître la sécurité des travailleurs (< -30°C) ;
- Port de gants pour manipuler des objets à < 0°C ;
Travail au froid interdit pour les femmes enceintes dès lors que la température est à < 0 °C ( Article R234-4**) ;
Conclusion
Le froid, bien que souvent sous-estimé, joue un rôle important dans l’apparition ou l’aggravation des troubles musculosquelettiques (TMS). Que ce soit par la diminution de la souplesse musculaire, l’augmentation de la fatigue ou la réduction de la circulation sanguine, il peut considérablement affecter les performances physiques et le bien-être des travailleurs exposés.
Cependant, ces risques ne sont pas une fatalité. Une bonne prévention passe par des mesures simples mais efficaces : vêtements adaptés, pauses régulières et aménagements du poste de travail. De plus, sensibiliser les équipes et intégrer ces pratiques dans une démarche globale de santé au travail est essentiel pour protéger la santé des collaborateurs tout en maintenant leur productivité.
Investir dans la prévention des TMS en période de froid est non seulement un levier pour améliorer les conditions de travail et le bien être des salariés, mais également un facteur clé de performance durable pour les entreprises.
* Le glycogène est une forme complexe de glucides stockée dans les muscles et le foie. Il se compose de longues chaînes de glucose qui, lorsqu’elles sont décomposées, fournissent une source d’énergie rapide et efficace pour l’exercice.
** “L’emploi auxdits étalages des femmes qui se sont déclarées enceintes est interdit d’une façon absolue après 22 heures ou lorsque la température est inférieure à 0° C.”
Sources :
INRS – https://www.inrs.fr/risques/froid/accidents-effets-sante.html
Résistance au froid : https://www.europe1.fr/societe/pourquoi-nous-ne-sommes-pas-egaux-face-a-la-sensation-de-froid-3587141
Exposition au froid : https://www.cchst.ca/oshanswers/phys_agents/cold/cold_general.html
Droit du travail : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGIARTI000006676880/1962-01-20/#LEGIARTI000006676880