Le guide des troubles musculo-squelettiques (TMS)
Qu’est-ce que les TMS ?
Les troubles musculosquelettiques (TMS) font référence aux atteintes des muscles, tendons et nerfs du corps humain.
Les TMS sont des « pathologies d’hyper-sollicitation ». Elles se développent lorsqu’il y a un déséquilibre entre les capacités fonctionnelles d’une personne et les sollicitations répétitives engendrées par une activité.
Les troubles musculosquelettiques se manifestent par des douleurs qui se situent généralement sur le haut du corps. Les zones principalement touchées sont :
- le poignet ;
- l’épaule ;
- le coude ;
- et le dos.
Parmi les maladies les plus courantes, on retrouve :
- le syndrome du canal carpien ;
- les tendinites ;
- l’endinopathie ;
- ou encore l’épicondylite au coude…
Les TMS représentent aujourd’hui la première cause des maladies professionnelles en France. Un environnement favorisant des contraintes de l’organisation du travail peut générer un déséquilibre entre les capacités psychiques et physiques et se révéler être à l’origine du déclenchement des troubles musculosquelettiques.
Les douleurs générées par les troubles musculosquelettiques vont empêcher le travailleur de réaliser ses tâches le menant souvent à l’arrêt maladie et parfois même jusqu’à des situations de handicap.
L’évolution constante des nouveaux outils de travail a également favorisé l’apparition de nouvelles situations de travail à risques pour les travailleurs.
Tous les secteurs sont concernés par les TMS. Cependant quelques secteurs sont les plus touchés :
- la logistique ;
- l’industrie agroalimentaire ;
- les métiers du Bâtiment et des Travaux publics (BTP) ;
- et la métallurgie.
Les TMS en chiffres
Le système de santé français connaît une épidémie de troubles musculosquelettiques. La population active du pays a été confrontée à une augmentation des cas ces dernières années, et de nombreux employeurs ont du mal à faire face par eux-mêmes… Ou, tout simplement, à comprendre comment ces maladies sont contractées.
L’infographie suivante met en lumière certaines statistiques clés sur cette tendance alarmante :
Les chiffres au sujet des TMS liés au dos montrent que :
- 1 accident sur 5 est causé par une lombalgie ;
- 2 mois d’arrêt en moyenne est requis pour un accident du travail lié à un mal de dos ;
- et 22 millions de journées sont perdues au titre des TMS et des maux de dos.
Les mécanismes d’apparition des TMS
Le mécanisme de survenu
L’activité professionnelle est au centre de l’apparition des troubles musculosquelettiques. On peut relever les activités suivantes susceptibles de déclencher des TMS :
- la manutention de charges ;
- les activités exposant les opérateurs aux vibrations mécaniques ;
- et les activités liées à l’utilisation d’écrans de visualisation.
Les douleurs en sont la manifestation la plus notable. Cependant, on relève aussi des apparitions souvent plus discrètes comme des raideurs, des maladresses ou encore de la fatigue.
Elles sont généralement présentes en amont de l’installation des troubles musculosquelettiques. Souvent bénignes au début, les douleurs peuvent s’installer dans la durée et se développer progressivement résultant alors d’une dégradation de la zone articulaire touchée.
Les différents niveaux d’atteinte
Les symptômes causés par les troubles musculosquelettiques peuvent subvenir à différents niveaux. Cependant, l’évolution d’un stade à un autre varie en fonction de chaque individu :
Les facteurs de risques des TMS
Les facteurs de risques se rapportent aux conditions qui les entourent et dont la présence peut être rapportée à une pathologie. La seule présence d’un facteur de risque n’est pas suffisante pour estimer le risque. Il ne s’agit pas d’un phénomène qui est ou qui n’est pas, c’est plutôt une question de degré.
De façon générale, la gravité d’un facteur de risque dépend de trois grandes caractéristiques : l’intensité, la fréquence et la durée. Les TMS sont des maladies plurifactorielles. On note donc une multiplicité des facteurs, on peut alors retrouver les catégories suivantes :
Les facteurs biomécaniques
La biomécanique touche les propriétés mécaniques du corps humain. On se concentre donc sur les mouvements générés par le corps. Les principaux facteurs de risques biomécaniques sont :
Les facteurs organisationnels
Parfois l’organisation du travail peut se révéler pathogène et donc source de risques de troubles musculosquelettiques pour les salariés. Un déficit dans l’organisation de travail peut regrouper :
- un dysfonctionnement au niveau des flux de matières ou humains ;
- une charge de travail trop importante ;
- une multiplication des tâches à effectuer sur la journée ;
- ainsi que des contraintes administratives…
Ce déséquilibre a un impact sur les conditions de travail physiques, psychologiques et sociales des salariés en entreprise.
Les facteurs environnementaux
Les conditions environnementales peuvent augmenter le risque de TMS. Parmi elles, on va retrouver :
🔹 L’ambiance thermique
L’ambiance thermique concerne les tâches avec une exposition à la chaleur et le travail avec une exposition au froid. Elle est souvent la cause d’une fatigue rapide. Le froid constitue l’un des facteurs aggravants de risques de TMS car il engendre une baisse de niveau sanguin dans les extrémités, augmente la force de serrage et le risque de blessures.
🔹 Le bruit
Contrairement aux idées reçues, tous les secteurs d’activité sont concernés. Selon l’INRS (l’Institut National de Recherche et de Sécurité), en France, plus d’un salarié sur cinq est exposé à des nuisances sonores qui sont potentiellement dangereuses pour sa santé.
L’exposition au bruit, mais également aux vibrations vient s’immiscer dans le quotidien des travailleurs entraînant fatigue et maux de tête. Les gènes peuvent entraîner des dommages parfois irréversibles pour la santé allant jusqu’à la surdité pour les expositions fréquentes et/ou prolongées. La surdité arrive en quatrième position des maladies professionnelles.
🔹 L’éclairage
Un mauvais éclairage peut entraîner une vision insuffisante des zones ou des machines dangereuses. Lorsque l’éclairage n’est pas adapté à la situation de travail, on retrouve des éblouissements et une fatigue visuelle qui peuvent engendrer des risques pour le travailleur.
Les facteurs psychosociaux
Selon le ministère de la Santé, on qualifie de « risques psychosociaux » (ou RPS) les éléments qui portent atteinte à l’intégrité physique et à la santé mentale des salariés au sein de leur environnement professionnel.
La grille de Gollac est un dispositif qui permet d’évaluer et de suivre la santé mentale des salariés.
On retrouve six types de facteurs de risques psychosociaux :
- les exigences émotionnelles ;
- le manque d’autonomie ;
- la mauvaise qualité des rapports sociaux au travail ;
- la souffrance éthique ;
- et l’insécurité de la situation de travail.
Les facteurs ne doivent cependant pas être étudiés séparément. Leurs degré et durée d’exposition peuvent donner lieu à des troubles musculosquelettiques.
En effet, le stress au travail, souvent premier facteur de risques psychosociaux, est étroitement lié aux troubles musculosquelettiques.
Sous pression constante, le salarié présente un accroissement de tension musculaire. Et sus l’effet du stress, la production de cortisol (hormone de l’inflammation) diminue la capacité de notre corps et allonge le temps de récupération. Le stress rentre également en compte dans la perception de la douleur et augmente la sensibilité des salariés aux risques de TMS.
Les facteurs personnels
En raison de leurs différences individuelles, tous les travailleurs ne seront pas atteints de la même façon. Une même charge de travail peut entraîner des lésions plus ou moins importantes chez une personne ou sur une autre.
Ces différences s’articulent autour de plusieurs facteurs :
🔹 L’état de santé
Un état de santé précaire comme la présence de diabète, le surpoids ou encore les rhumatismes inflammatoires accélèrent le développement des troubles TMS. S’il y a des antécédents de fractures, cela peut favoriser l’apparition des troubles. Le manque de mouvement et la sensibilité de chacun entrent également en jeu dans le développement des TMS.
🔹 Le genre
Les femmes sont plus touchées par les troubles musculosquelettiques que les hommes. Les postes assignés aux femmes (aide à domicile, hôtesses de caisse, aide-ménagère, etc.) sont dans la majorité liés à des gestes répétitifs et à des cadences élevées, les exposant, par exemple, davantage à des troubles du canal carpien.
🔹 L’âge
Les jeunes sont les moins touchés par les risques de TMS certes, mais les mécanismes d’apparition peuvent survenir à tout âge. S’ils ne sont pas pris en charge assez tôt, les troubles développés peuvent déclencher des douleurs chroniques. Il est donc nécessaire de faire de la prévention une priorité afin de limiter l’exposition aux risques.
Les conséquences des TMS
Une dégradation de la santé et de la vie professionnelle des salariés
Pour le salarié touché, les TMS entraînent irrémédiablement des douleurs chroniques et parfois même irréversibles. En effet, les TMS non soignés peuvent donner lieu à un handicap sérieux dans la vie professionnelle et/ou dans la vie privée.
Pour les salariés qui peuvent, au terme de leur arrêt maladie, reprendre le travail, une mutation à un autre poste ou un reclassement professionnel est parfois nécessaire. Si cela est impossible, le salarié peut se retrouver confronté à de la désinsertion professionnelle. On peut également parler de désinsertion sociale, puisque les salariés se retrouvent isolés chez eux, rompant alors les liens tissés entre collègues au travail.
Au sein de l’entreprise, les absences causées par les TMS provoquent souvent une surcharge de travail pour les salariés et génèrent des tensions ainsi que plus de difficultés à communiquer de façon sereine sur le travail. Avec des tâches plus importantes, cela va entraîner pour eux une sursollicitation musculaire et le risque de TMS augmente.
Un cercle vicieux donc, et qui devient nuisible pour tous.
Lorsque les TMS sont présents, on note également une augmentation des risques d’accident au travail liés au manque de capacités dues aux douleurs chroniques et à la fatigue.
Des répercussions sur l’activité et les dépenses de l’entreprise
Les salariés ne sont pas les seuls à subir les conséquences des TMS. L’entreprise fait face elle aussi aux répercussions des TMS. On retrouve des conséquences en termes de dysfonctionnements organisationnels, de coûts élevés pour l’entreprise ou encore un ralentissement de l’activité. Cela entraîne irrémédiablement une baisse qualitative et quantitative de la production.
Les coûts engendrés par des troubles musculosquelettiques regroupent notamment :
- les indemnisations versées aux salariés en arrêt à la charge de l’employeur ;
- les cotisations accident de travail (AT) et maladie professionnelle (MP) versées à l’Assurance Maladie ;
- ainsi que les frais liés à la recherche de remplaçants (intérim, CDD…) et d’aménagement des postes de travail pour les personnes touchées par les TMS.
- et pour le nouveau personnel, la montée en compétences est souvent synonyme de coûts de formation significatifs.
Un taux de TMS élevé a également un fort impact sur la productivité de l’entreprise.
Ceux touchés par les TMS qui sont les plus anciens représentent une vraie perte d’efficience et de compétences pour l’entreprise. Leur expérience reste souvent non transmise aux nouveaux salariés. Le temps d’adaptation et de formation peut s’avérer important pour ces derniers. En conséquence, les objectifs de productivité restent souvent non atteints pour l’entreprise.
Les obligations des employeurs
Que dit la loi ?
Actuellement, il n’existe pas de réglementation liée à la prévention des risques liés aux troubles musculosquelettiques.
L’obligation générale oblige cependant l’employeur à préserver la santé physique et mentale de ses salariés (article L. 4121-1 du Code du travail). Il doit :
- identifier les risques ;
- en informer les salariés ;
- mettre en œuvre des moyens de prévention ;
- et remédier aux dysfonctionnements.
Après une étude et évaluation des risques, l’employeur doit formaliser le tout dans le Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels qui se doit de contenir un plan de prévention.
Les entreprises sont dans l’obligation de déclarer les accidents du travail et les arrêts de travail. Ces déclarations sont prises en compte dans le calcul de la cotisation accident du travail et maladies professionnelles. Le taux est fixé par la Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail (CARSAT).
Les 9 principes de prévention
Les TMS n’ont pas à être une fatalité. Une stratégie de prévention efficace va tenter d’éliminer les dangers à la source et aider les salariés déjà touchés en trouvant des solutions adaptées. Afin de mettre en place une bonne démarche de prévention, il vous faudra vous appuyer sur les neuf principes qui définissent les périmètres de l’organisation de prévention :
🔹 Principe #1 : Éviter les risques
Supprimer l’origine du risque ou le réduire en réfléchissant aux éléments qui peuvent être source de danger pour les salariés.
🔹 Principe #2 : Évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités
Conduire une bonne analyse afin de pouvoir déterminer la juste nature des risques. Lors de cette analyse de l’activité, on retrouve les informations suivantes :
- combien de salariés sont exposés au risque ;
- à quels moments ;
- et pendant combien de temps.
Cette récolte de données permettra à l’entreprise de hiérarchiser et axer les actions à mettre en place et à faire passer en priorité dans une démarche plus globale de prévention.
🔹Principe #3 : Combattre les risques à la source
Essayer de placer la prévention le plus en amont possible, et ce dès la conception des postes de travail et de l’instauration des méthodes de travail.
🔹Principe #4 : Adapter le travail à l’Homme
Comprendre les capacités humaines ainsi que ses limites pour adapter les situations de travail ainsi que l’utilisation des équipements.
🔹Principe #5 : Tenir compte de l’état d’évolution de la technique
Le choix des méthodes de travail, des outils ainsi que des équipements doit prendre en compte les nombreuses avancées technologiques. Il est important d’assurer une veille en ce qui concerne les évolutions techniques et organisationnelles.
🔹Principe #6 : Rendre le travail moins dangereux
Remplacer les substances par des alternatives moins dangereuses pour la santé du travailleur. Exemple : un produit classé cancérogène par un produit moins nocif.
🔹Principe #7 : Mettre en place la prévention
Planifier en donnant une importance à y intégrer, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales, ainsi que les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel.
Ce plan d’action va définir les périmètres de la démarche de prévention avec des objectifs clairs et précis. Le but étant d’assurer une évolution pour l’entreprise et sa culture de sécurité.
🔹Principe #8 : Prendre des mesures de protection collective
Limiter ou éviter l’exposition au danger des salariés en donnant la priorité sur les protections collectives plutôt qu’aux dispositifs de protection individuelle :
- des casques ;
- des masques ;
- des gants ;
- des combinaisons ;
- ou encore des chaussures de sécurité.
🔹Principe #9 : Donner des instructions claires aux travailleurs
Les salariés doivent connaître et comprendre les risques auxquels ils sont exposés. Il est crucial d’inclure les travailleurs au cœur de la démarche de prévention. Le tout est d’instaurer un espace où la parole de chacun est libre et où la volonté de protéger la santé des travailleurs règne.
Les gains d’une prévention efficace
Les bénéfices directs
Réduire le coût des indemnisations et cotisations pour l’entreprise
Les troubles musculosquelettiques représentent un coût conséquent pour l’entreprise. On estime que le coût moyen d’un TMS pour une entreprise est équivalent à un treizième mois de salaire.
À titre d’exemple, l’arrêt d’un salarié pour le syndrome du canal carpien – l’un des troubles les plus répandus – représente 12 780 euros et un arrêt de 151 jours. En parallèle, un fort taux d’arrêts maladie des salariés va engendrer une hausse de la cotisation accidents du travail et maladies professionnelles (AT/MP).
Éviter l’absentéisme et la perte de productivité
Dans les conséquences les plus directes des problèmes en entreprise liés au TMS, on retrouve l’absentéisme. Beaucoup de travailleurs touchés par les troubles musculosquelettiques sont contraints de se mettre en arrêt maladie. Pour pallier les absences, l’entreprise a souvent recours à de l’intérim. De nouvelles recrues rarement qualifiées aux tâches et qui demandent plus ample formation.
Travailler sur l’amélioration des procédés va également permettre d’optimiser les rendements, mais aussi de concevoir des produits de meilleure qualité.
Les bénéfices indirects
Les bénéfices indirects ne se mesurent peut-être pas financièrement, mais les répercussions d’une bonne démarche de prévention assurent une contribution indéniable à l’amélioration de la productivité et à la performance d’une entreprise.
Pour un renforcement de l’image de l’entreprise
Une prévention efficace améliore la marque employeur. Pour une TPE, les soucis liés aux accidents du travail, un fort taux d’absentéisme ou encore une baisse de productivité peuvent être connus par les entreprises voisines et éroder l’image perçue de votre entreprise.
Si au contraire, des mesures sont prises en matière de prévention, cela peut booster l’image que vous renvoyez à autrui. Les entreprises montrent une volonté des dirigeants à assumer leurs responsabilités sociales.
C’est un véritable gage de confiance pour vos futurs partenaires. Vos engagements sont perçus comme émanant d’une forte capacité à améliorer les conditions de travail et l’environnement des salariés. En plus de renforcer l’image, cela peut ouvrir la porte à d’autres actions en matière de RSE. Des études ont montré qu’une démarche RSE se plaçait comme un levier d’attractivité en faisant notamment ses preuves dans le processus de recrutement des jeunes candidats.
Vers un meilleur engagement des employés
Cela va sans dire, un environnement de travail sain et sécuritaire renforce et améliore le bien-être des salariés. Un salarié qui se sent valorisé par son entreprise est plus à même de s’investir dans l’activité de son entreprise et d’aider à atteindre les objectifs fixés. Pour l’entreprise, cela va se traduire par un taux de turnover moins élevé et une augmentation des tâches de travail exécutées par des salariés motivés.